dimanche 28 octobre 2007

Des principes de Waitress

Vendredi. Waitress se pointe au bar, pour participer à la fin du cinq-à-sept. Assise au comptoir, je commande une bière, question de ne pas exagérer autant que la semaine précédente. Les gins & tonic, c’est traitre.


Al Bee m’accompagne, se tient à ma gauche. Nous nous relatons les diverses aventures de la semaine. Mon boulot et les hésitations, M. Magazine et l’envie de mourir sur place. Il me raconte la belle S. qui lui torture le cœur, qu’il ne veut plus revoir pour un temps. Arrive une série de shooters, gracieuseté la Barmaid. La traditionnelle tournée des « Amis du vendredi ».


Al Bee me présente son voisin, Pit. Une connaissance. Il discute avec nous, on déconne. Sur leur pseudo sortie de prison pour le week-end, de ma condition de dinde qui commence à freaker à l’approche de Noël.


20h17. Al Bee doit quitter, rejoindre une autre amie à qui il a promis de faire les courses.

- Tu fais quoi ensuite, Waitress ?
- Aucune idée encore, pas de plan pour la soirée.
- Moi je vais repasser plus tard. Penses-tu rester ici ?
- Sais pas, j’irai peut-être en haute-ville.
- Laisse un message sur le répondeur si tu vas ailleurs.


Je vais appeler Copine. Répondeur. Plus tôt, je lui ai laissé un message comme quoi je serais au bar, une invitation à me rejoindre. Elle ne viendra pas.


De retour à mon tabouret, une vodka attend à côté de ma bière. Chin-chin, Pit. Nous conversons à propos du service, métier qu’il a pratiqué pendant de nombreuses années. Jusqu’à écœurement. Il a alors entrepris une formation en boucherie. A vécu sa jeunesse dans un chalet près de ma ville natale. Nous en parlons. Puis, la littérature et le cinéma passent. Nos goûts sont souvent similaires. Conversation intéressante.


Nous montons au deuxième étage, où il y a moins de monde et moins de bruit. Vodka, vodka, bière. Je finis par me retourner et constater qu’Al Bee est de nouveau à mes côtés. On déconne un peu, lui me regarde avec de grands sourires.


Pit se rapproche de plus en plus de mon corps. Frisson. Sa main saisit la mienne. Il s’approche et m’embrasse. Ses lèvres pulpeuses sur les miennes. Frisson. Je me retire un peu. Il revient, n’ai pas la volonté de résister. Me propose d’aller chez moi.


- Non.


Il insiste, j’ai envie de flancher. Il m’embrasse encore, me mordille le bras. Chair de poule.


- J’aimerais te faire l’amour.
- Moi aussi. Mais, non.


Je sors fumer une cigarette avec Al Bee. Lui raconte ce qui se passe.


- Pourquoi tu dis pas oui ?
- Parce qu’il est tellement en couple.
- C’est pas ton problème.
- Je sais. Mais j’veux pas m’immiscer dans cette histoire-là.


Il me fait un colleux, me flatte les cheveux. Retour à l’intérieur. Pit poursuit son manège. Me murmure des obscénités au creux de l’oreille, m’embrasse, me mords. Sa main conduit la mienne à son entrejambe. Érection. Je me tasse, fais de gros yeux. Non. Non. Non.


Je commande deux gins d’un coup. Bois le premier en deux gorgées. Il sait maintenant que je ne changerai pas d’idée. Quitte le bar. Je bois l’autre verre doucement, les yeux rivés sur le comptoir. Last call. C’est à mon tour de partir.


Tôt samedi matin, je me suis réveillée. Encore cocktail. Un goût amer dans la bouche. Sans savoir pourquoi, je me doute qu’il m’aurait fait l’amour doucement. Qu’il aurait su dévorer mon corps, que nos gestes auraient gagné en agressivité. Que s’aurait été bon. Il aurait remis ses vêtements. Appeler un taxi pour regagner son appartement. Et sa copine.


Mais j’exige une cuillère après l’amour.

vendredi 26 octobre 2007

So fashion

Waitress marche sans presse dans la rue. Il fait déjà noir. L'air est froid dans mes poumons, la lune bien ronde entre les immeubles. Direction dépanneur, question d'acquérir de nouveaux bâtons de tabac et de remettre ma location vidéo.

Avec ses milliers de néons trop éblouissants et le mouvement qu'on distingue par les deux grandes fenêtres entourant la porte, le petit commerce ressemble à une promesse de vie et de chaleur dans la nuit.

À la caisse, un homme discute avec le commis.

- J'suis content, je vais pouvoir faire mon lavage.
- Good. Bonne soirée, Monsieur.


L'homme porte de gros bas de laine gris dans des pantoufles vertes et bleues. Assorties à son vêtement de nuit. Continue de parler de sa lessive.

Je me dirige vers le fond du dépanneur, question de voir si un bon film ne m'attend pas sur les rayons. Un autre homme, aussi en pyjama. Avec des bottes de construction dans les pieds. Eh.

Je règle mon achat, et comme je pousse la porte, arrive une femme dans la quarantaine. Avec une jaquette bleue pâle, un peignoir, bas de laine et running shoes.

Le matin, je ne me serais pas posée de question. Mais à 18h00, rencontrer trois personnes qui ne se connaissent pas, habillées pour dormir pour se rendre au dep, je trouve ça louche.

Je n'ai pas feuilleté de magazine de mode depuis un moment déjà. Ma dernière visite au centre commercial remonte à longtemps aussi. Serait-ce une nouvelle mode ? Pourquoi personne ne m'a avertie ?

Après le boulot, je ne prends pas de chance. J'irai acheter le Elle Québec et le Clin d'Oeil avant de me rendre chez La Senza. Ou chez Sears, selon les recommandations des bibles de la mode.

Chose certaine, j'arrête de refaire mon maquillage pour aller au dépanneur. J'veux surtout pas avoir l'air complètement out.

jeudi 25 octobre 2007

Du désenchantement

Waitress se prépare pour le travail. Sous la douche, je me mets à trembler. Je me sens nerveuse, comme à tous les matins. Tente de me raisonner en me parlant à voix haute « Ça va bien aller, calme-toi ». En fait, j’aurais plutôt envie de me rouler en boule dans mon lit et de ne pas répondre au téléphone lorsque le patron me cherchera. Disparaître, faire la morte pour lui.


Dans la voiture, mes muscles se contractes sans que j’y mette de volonté. Monte le son, allume une cigarette et je gueule sur la musique. Ça passe.


J’entre au restaurant. Vais déposer mon manteau, mon sac au sous-sol. Ça recommence. Et là, ça ne me quittera plus. Je prends les informations sur le menu du jour, vérifie ma section, termine la mise en place en surveillant la porte. À midi pile, je sais que je serai dans la merde.


Ma section se remplie d’un coup. J’apporte les verres d’eau, les apéros, prends les commandes. J’ai des entrées qui sortent sur le passe, ma collègue vient de partir avec les paniers à pain que je m’étais préparée, un câlis de capuccino à faire, des desserts à réchauffer et décorer, une facture à remettre et je vois que j’ai deux nouvelles tables d’arrivées.


Patron m’accroche pour me dire que c’est trop long à la 24. Que j’ai fait passer la 22 avant. Merde, ils m’ont donnée leur commande en rentrant dans le resto, les autres savaient pas encore ce qu’ils voulaient !


13h27. Ne reste plus que quelques clients qui sirotent leur thé vert. La tension retombe, j’entreprends le ménage. Avec le sentiment d’être nulle, pas à la hauteur.


Et ainsi, cinq jours par semaine. J’ai des cauchemars où on m’attaque, me menace, je dors mal. Je m’éveille en sachant que je vais aller vivre deux heures sur la corde raide. J’ai beau me dire que je m’en vais « jouer » au restaurant, ça reste quand même. Le chef avec son air bête, sa tendance à ne pas me répondre quand je pose une question. Le lundi, alors que Patron est absent, il me pète des coches parce que je prends les commandes trop vite. Le mardi, Patron me pète des coches parce que je ne prends pas les commandes assez vite.


Mon nouveau boulot ? Je sais pas. Je me demande si je dois laisser une chance ou bien déguerpir au plus sacrant. Parce qu’aujourd’hui, j’ai de profonds cernes noirs sous les yeux. Et j’commence à faire des boutons.

mardi 23 octobre 2007

Journée merdique d'octobre

Encore une nuit agitée. Je suis sur le canapé, endormie, lumières et télévision ouvertes. J’entends quand même ce qui se dit à l’écran. Une voix de petit garçon. Qui présente la météo. Allez savoir pourquoi, Waitress a la trouille. Terrifiée par un présentateur de météo, âgé de six ans. J’entends un bruit, qui provient de la porte d’entrée, située à la gauche du sofa. Quelqu’un qui entre chez moi. Je ne dors plus, mais garde les yeux clos. Trop peur de voir ce qui se passe. Sens la personne se déplacer, passer devant mon corps. Ou plutôt je le devine aux frottements de ses vêtements. L’inconnu s’assoit sur le divan, près de mes jambes. Waitress attend la suite. On soulève un bâton. Pour me frappe derrière la tête.


J’émerge du sommeil. Je suis sur le canapé, lumières et télévision ouvertes, allongée dans la même position que dans le rêve. Le cœur qui bat fort, je ne veux pas regarder autour de moi. Au cas où il y aurait quelqu’un. Je me raisonne après un moment, vais me coucher dans mon lit. Le même rêve une autre fois au cours de la nuit.


À 11h00, je quitte l’appartement pour me rendre au travail. Cigarette aux lèvres, Metric dans les oreilles. Sur le chemin St-Louis, tout prêt du restaurant, une voiture surgit d’une allée, me coupe le chemin. Au lieu d’avancée, elle s’arrête dans la rue. Demeure immobile. J’écrase la pédale de frein. Ma Sunfire glisse sur l’asphalte mouillée, un coup de volant à droite. Certaine d’emboutir le derrière de l’autre, je m’arrête à quelques millimètres de lui.


Les mains tremblantes, je me présente au travail. Le patron m’apprend que sept journalistes viennent luncher chez nous, que je m’occuperai d’eux. Pas de problème. Puisqu’ils arriveront d’ici peu, je tente de me ressaisir. Avec plus ou moins de succès. Toujours parcourue de tremblements, la bouche sèche. Ils arrivent. Prennent l’apéritif. Un deuxième. Ils attendent l’arrivée d’un retardataire. Tandis que je sers une autre table, Monsieur Magasine se pointe. (Voir ici et )Merde. Merde, merde, merde.

Patron m’accroche pour me dire qui il est.


- Je sais.
- Une ancienne flamme ?
- Non.
- J’espère que l’histoire s’est bien finit, faudrait qu’il parle en bien du resto…


Dès qu’il me voit, il se lève, m’embrasse les joues, demande de mes nouvelles.


Les mains tremblantes, j’ouvre les bouteilles de vin, en fait le service, apporte les corbeilles de pain, les entrées sous l’œil calculateur de M. Magasine.


Malgré la nervosité, tout se passe bien. Waitress retire les assiettes vides, remplit les verres de vin, ajuste les couverts. Puis, le voisin de M. Magasine m’accroche par le coude.



- Mademoiselle, vous savez que le beau jeune homme ici est célibataire ?


Waitress bégaie. Merde, merde, merde. POURQUOI MOI ?


M. Magasine me demande si je passe l’hiver dans ce bistro.


- J’en suis à ma première semaine, je sais pas encore.


Premier à quitter la table pour poursuivre sa journée de travail, le garçon me fait à nouveau la bise en ajoutant qu’on se reverra bientôt. Sûrement, oui…


Avec un chef à l’air bête, aux réponses cinglantes, avec la pluie et le fait que ce n’est que le deuxième jour de la semaine, c’est ce que j’appelle une journée de merde.


Et en passant. Les journalistes, ça mangent et boient comme des porcs.



lundi 22 octobre 2007

Agitation

Dans la nuit de samedi à dimanche, j’ai fait un rêve étrange. De ceux qui vous fichent le cafard longtemps, même après une nouvelle nuit vide. Waitress déteste ce genre de songe. Comme s’ils annoncent de grosses briques à prendre sur la tête. Impuissance. Angoisse.

Janvier ou peut-être février. Une journée noire et froide. Ce n’est pas seulement l’hiver; je me sens attaquée par la température, même la Nature m’en veut. Une sorte de menace. Je marche dehors. La lune éclaire le chemin, mon haleine se transforme en buée. Je m’arrête devant une petite maison. Par l’unique fenêtre, je vois la lumière d’une bougie. Du mouvement. Puisque je grelote, je décide d’y entrer.

À l’intérieur, un vieux plancher, des poutres au plafond. Des meubles massifs partout, des livres recouverts de poussière. Je m’assois à la table et je regarde les dessins que forment les nœuds du bois. Lorsque je relève la tête, une femme se trouve en face de moi. Une cousine que je n’ai pas vue depuis quelques années. Les yeux exorbités, le visage plissé par la colère. Elle lève la main, me pointe de l’index. M’apprend qu’elle veut me tuer. Je tente de discuter avec elle, mais ça ne mène à rien. Je sais qu’elle mettra ses menaces à exécution. Je me sauve de la maison.

Retour à l’extérieur. Je courre dans la neige, il n’y a plus de lumière, je ne vois plus du tout où je vais. « L’hiver m’attaque, l’hiver aussi veut me tuer ». Je me répète cette phrase en boucle.

Je finis par arriver devant une autre maison. Là, c’est un feu de foyer que j'apperçois par la fenêtre. J’y entre. Les murs sont couverts de cadres. Différents de taille, de couleurs, de motifs. Et tous vides. Juste du noir ceinturé de bois. La propriétaire des lieux les montrent à un groupe de femmes qui se trouvent là. Mes yeux rivés sur un cadre double, teint en bleu et sans détail. « Je ne pourrai pas m’y cacher ».




Et je me réveille. Avec cette angoisse dans la poitrine qui me tient depuis deux jours.

dimanche 21 octobre 2007

Opération sauvetage

Cadran. Dimanche, 7h30. Dernier déjeuner à l’île. Désormais, le restaurant ne sera plus ouvert que du mercredi au samedi soir. Snooze. Encore dix minutes de sommeil. Alors que ma tête revient sur l’oreiller, un hurlement de chat. Ils se battent ensemble, une fois de plus. Un autre cris, encore plus puissant. Pas normal, quelque chose cloche. Comme s’il y avait du désespoir plus que de la colère dans ce que j’ai entendu. Ça provient du bout de mon lit.


Sur le plancher, deux chatons, les femelles. Voulant les éloigner, je saisie un des deux corps. L’autre suit. Bordel, elles sont féroces ce matin. Je tire dessus pour les séparer, les miaulements reprennent. Slap. On m’a chopée un doigt, ça fait mal, le sang apparaît. Les chats retombent sur mon lit. Je les observe quelques secondes. Elles ne se chamaillent pas. Elles sont coincées.


Tout autour de mon couvre-lit, il y a des franges. À force de passer à la laveuse et à la sécheuse, certains fils ont été tirés, d’autres se sont emmêlés. Les petites chattes au travers des paquets de nœuds. Elles respirent avec difficulté. Les cordes autour de leur gorge.


Waitress en panique. Mes doigts tentent de dégager leurs cous, mais tout est si serré que je n’y arrive pas. Je cours chercher les ciseaux au salon. De retour à mon lit, je constate que les deux corps sont retournés au plancher. Que ça ne bouge plus. Je les ramène vers moi. Elles ont déféqué. Merde, merde, merde. Grouilles Waitress, y’en a plus pour longtemps.


Les ciseaux, payés 1$, sont pourris. Les lames ne rompent pas les fils, et mon effort pour les insérés entre la peau et la corde font souffrir les minous. Je me fais mordre à nouveau. Un couteau, un couteau.


Je me rends à la cuisine, revient aux chats. Je coupe un fil, le retire du corps. Toujours coincé. Il y en a trois qui passent autour du petit cou. Je les romps, un chat de dégagé. L’autre, les yeux ouverts, ne bouge plus, ne respire plus. Waitress pleure, pleure, pleure, les liens sont si serrés que j’ai de la difficulté à les trouver. À force d’acharnement, je réussis à les retirer. Un chat tout mou contre ma poitrine.


Je sens le cœur battre. Une pulsion espacée de plusieurs secondes. Le pouls qui s’accélère, la respiration reprend. Une petite chatte épuisée contre moi, mais bien vivante.


Ce matin, Waitress n’a pas eu besoin de café.

mercredi 17 octobre 2007

Le clan lesbien

Française au téléphone, la voix nerveuse. Me demande de l’accompagner pour un souper dans un restaurant du Vieux-Port. Avec trois de ses copines, dont la Chanteuse. Une femme charmante qui lui plaît beaucoup, de là sa fébrilité. Elle craint de faire des gaucheries, de casser de la vaisselle sans le vouloir. J’accepte.


Quelques heures plus tard, sa voiture s’arrête devant l’appartement. J’entre à bord et vois tout de suite qu’elle stresse à l’idée de se retrouver auprès de l’objet de ses désirs. Je tente de la rassurer, de lui faire comprendre qu’il ne peut pas arriver grand-chose de bien terrible. Rien à faire. Elle conduit comme une folle, sa voiture qui zigzague entre la voie de gauche et celle de droite pour arriver à l’heure. C’est-à-dire avec trente minutes de retard.


Arrivées à l’Inox, nous prenons une bière avec Chanteuse et Matante avant d’aller au resto, où la P’tite Rockeuse nous attentant depuis quarante cinq minutes. Nous nous attablons, disons des niaiseries avec la serveuse, une amie aussi.


Française, avec toute son agitation, rit comme une loutre, ce qui dérange les autres clients. Reste que le plaisir est là; ça déconne, ça jase, la nourriture et le vin sont bons.


Tandis que je raconte une anecdote, LA question tombe.

- Es-tu lesbienne ?


Je n’ai jamais été amoureuse d’une femme. Je ne crois pas, donc. Cette question ne me dérange pas en tant que tel. Ce que je ne comprends pas par contre, c’est la raison de la poser. Lorsque je me trouve avec des hétérosexuels, on ne me demande pas mon orientation sexuelle. En compagnie de garçons gays non plus. Mais les lesbiennes me le demandent à chaque fois que je les rencontre. Pourquoi ? Est-ce que ça vient vraiment changer quelque chose à la personne que je suis ? À la conversation que nous tenons ? Peut-on simplement se côtoyer en toute amitié ou faut-il absolument définir les cadres qui nous entourent et les possibilités de couchettes ?


Parce que chaque fois que j’ai eu à répondre que je suis hétérosexuelle, on me regarde ensuite avec dédain. Pourquoi ? Quelques minutes avant, j’étais pourtant une fille sympathique. On m’exclu alors un peu des conversations, on ne me pose plus de questions.


Waitress devient alors pâle et sans intérêt. Un peu tannant.

lundi 15 octobre 2007

Un lundi d'octobre

Le Jeune Homme sort à peine de chez moi. Une belle journée, une belle soirée comme il n'en a pas eu depuis longtemps.

Aujourd'hui, lundi, premier jour à l'essaie à mon nouvel emploi. L'entrevue de la semaine dernière s'est finalement bien déroulé. Le patron du resto a à peine regardé mon CV, ce qui m'a donnée un bon coup de main. Je lui ai fait comprendre que je sais m'adapter à toute situation et que je connais bien mon métier, même si je le pratique depuis moins de deux ans. Il m'a crue, m'a fait confiance, ce qui m'a été bénéfique ce midi, alors que nous attendions quinze clients et que s'en est pointé plus que le double de nos espérances.

Au retour du boulot, je devais joindre Joli Minois pour un rendez-vous. Une voix nasiale au téléphone, il est grippé. Dur. Trop pour qu'il lui soit possible de me rencontrer. Puisque la dernière fois qu'il devait me voir il était trop fatigué, je me dis que cette histoire ne mène à rien. Je choisie de mettre une croix dessus. Tannée des espérances. J'ai mieux à faire. Waitress du vent à nouveau, des histoires sans queue ni tête, du ballottement. Rien à faire des emmerdeurs.

Jeune Homme qui me propose de le rejoindre à son boulot, sur une rue piétonnière du Vieux-Québec. Je le rejoins avec seulement quinze minutes de retard. Prêts pour un souper au Moine Echanson, question de découvrir de nouveaux fromages et charcuteries du terroir. Un lieu où l'on peut même boire du vin d'ici, tellement bon que mes propres préjugés tombent.

Nous marchons sur la rue St-Jean, animée par quelques touristes égarés. Au Carré d'Youville, trois bonshommes de neige nous attendent, l'air heureux. La patinoire est ouverte, un tas de neige font juste à côté. J'ai une envie de bagarre de boule de neige, envie non partagée. J'opte donc pour l'abstinence.

Un peu plus loin sur St-Jean, le resto est fermé, de retour mercredi. Merde.

- Jeune Homme, on fait quoi ?
- J'sais pas trop. J'ai une envie de sushis debord.

Nous convenons d'un établissement pas trop loin du Drague. J'en ai entendu de bons commentaires. L'endroit est malheureusement fermé. Nous parlons de la possibilité d'aller au Blue Grill, où nous ne sommes jamais allés. Nouvelle expérience. Tandis que nous marchons, Jeune Homme propose d'aller cogner chez le Maiken. Pourquoi pas ? Je me mets un peu de baume à lèvre, juste au cas.

Je cogne à la porte du dit Maiken. Qui répond, clop en bouche, vêtu d'un pyjama. "Fuck" et la porte se referme. S'ouvre à nouveau, comme une invitation à pénétrer dans l'appartement. Nous nous exécutons.

Trois personnes à une table du Blue Grill, désert. Nous discutons, de choses et d'autres. Moi, de Joli Minois qui me floche doucement, que je veux cesser de fréquenter. Du Jeune Homme et du Black & Blue. Du Maiken et de sa dernière fréquentation. Du Jeune Homme et de sa future date. Du célibat, du temps qui passe, de ma volonté à rencontrer un homme assez aisé pour m'emmener dans des cocktails dînatoire pour que je puisse me montrer en belle robe noire ou rouge sexy signée Chanel et boire des bulles.

La nourriture est infecte. Nous discutons quand même. le Maiken trouve la serveuse Jolie. Je ne suis pas d'accord avec lui, Ni souriante ni sympathique, elle fait son boulot comme si nous étions de trop dans la salle, pourtant vide.

Nous allons à l'épicerie, JH et moi avec une envie de tartare, le Maiken avec l'envie de faire les courses. J'y rencontre un ancien collègue de travail, smouck smouck, becs sur les joues, comment ça va.

JH et moi devant un tartare avec trop de mayonnaise chez moi. Infecte aussi.

Mais la Waitress avec un sentiment de bien être; l'impression d'avoir passé une journée où elle se sent un peu vivante, enfin.

Et le Joli Minois qui ne fera plus parti des préoccupations quotidiennes...

samedi 13 octobre 2007

Du manque d'organisation

Jeudi, environs cinq minutes avant qu’il soit l’heure de quitter l’appartement pour rejoindre mes collègues à l’Île-d’Orléan. Waitress en panique, les cheveux mouillés, pas maquillée, attendant que ses vêtements soient prêts à sortir de la sécheuse. Téléphone.


C’est Balou, avec sa voix post-calvados. Il m’apprend qu’il dîne avec un ami, propriétaire d’un restaurant dans le très cossus Sillery. Qu’il est à la recherche d’une serveuse le midi à temps partiel. Vingt secondes plus tard, j’obtiens un rendez-vous avec le patron du bistro pour le lendemain, à 14h00. Waitress toujours en panique, avec le sourire.


*

Vendredi, mes yeux s’ouvrent. Pas de téléphone qui sonne. Il doit être tôt. Une femme doit me joindre vers 10h30 pour obtenir mon adresse. Elle se choisira un chaton. Un de moins. On se rapproche de la paix.


À la cuisine, je prépare la cafetière. Mes yeux tombent sur l’heure. Eh merde. 12h47. Ne jamais se fier sur les inconnus pour se lever.


Il me reste une heure et dix minutes pour me présenter à l’entrevue. Mon CV n’est pas à jour. Mon imprimante est chez Jeune Homme. Je l’appelle. Répondeur. Je regarde sur MSN. Pas connecté. Merde, merde, merde. Je regarde dans ma boîte de courriel, peut-être que la dernière fois que j’ai fait mon CV chez lui, j’ai pensé à me l’envoyer pour conserver une copie de sauvegarde. Non. Pas fait. Merde, merde, merde. Et puisque j’ai un nouvel ordinateur, je n’ai même pas un vieux modèle d’il y a trois ans pour prendre de la vitesse.


Je trouve une copie papier du dernier que j’ai fait. Un peu chiffonné. Rendu là, on s’en fou. J’appelle Française.


- Je te réveille ?
- Un peu.
- As-tu une imprimante ?
- Oui, mais elle n’est pas branchée depuis que j’ai déménagé.
- Ok. Je peux passer chez toi pour imprimer ma lettre de présentation pour mon entrevue ?
- Ça ressemble à une fille qui manque d’organisation.
- Je sais, je sais. Je peux-tu ?
- Oui, je t’attends.


Vite fait, je rédige une lettre de présentation. Des conneries. Jamais je n’ai donné quelque chose d’aussi insipide à un employeur potentiel. Tant pis. Je regarde l’heure. 13h09. Waitress pas douchée. Je n’ai pas le temps de me préparer, de passer chez Française et d’arriver à l’heure au resto.


- Française ?
- Voui ?
- Je peux te demander un énorme, ÉNORME service ?
- Quoi ?
- Je peux t’envoyer ma lettre par e-mail pour que tu l’imprime et passes me la porter pendant que je me prépare ?
- Ish.
- Je t’en prie !
- Ok, ok.


J’envoie le document à ma copine et comme je m’apprête à entrer dans la douche, la sonnerie du tel.


- Waitress, ton Word est trop récent, je peux pas l’ouvrir.
- Merde, merde, merde. Je fais copier coller alors.


Waitress saute dans la douche, enfile un pantalon noir, une camisole noire et une veste noire à la vitesse de l’éclair. Le temps de me coiffer et de me maquiller, on cogne à la porte. 13h35. Française en boxer devant moi, un pli de drap sur la joue droite.


Elle me tend une feuille. Pépin. Gros pépin. Le texte, en tout petits caractères, prend à peine la moitié de l’espace en plus d’être enligné à droite. C’est laid. Très laid. Waitress a envie de chialer. Un CV pas à jour, froissé, avec une horrible lettre de présentation, autant au point de l’esthétique que du contenu. Waitress chiale un peu. S’excuse et dit merci. Française repart, je demande un taxi.


13h52. Waitress entre dans une belle salle à manger, aux murs orange brûlé et tangerine. Trois serveurs, jeunes, souriants.

Nerveuse, nerveuse.

mercredi 10 octobre 2007

Mise à mort, Part II

J’invite Joli Minois à la cuisine, où il découvre Française en pleine préparation du repas. Je me sens affreusement gênée; elle aurait dût être partie à son arrivée. Ainsi, il m’aurait été possible de mentionner qu’elle m’avait donné un coup de main, plutôt qu’il constate qu’elle a tout fait. J’offre une bière à JM, nous discutons tous ensemble.


JM : Tu restes souper avec nous ?
Française : Non, je finis ma bière et je me tire.
JM : Ben non, ça pas de bon sang, faut tu restes.
Française : J’ai quelque chose de prévu plus tard, je pourrai pas.
Waitress : Bha, tu prendras l’apéro avec nous, alors ?


Trois flûtes à champagne apparaissent, puis la bouteille de vin mousseux. JM fait une drôle de tête. Il vient d’apercevoir les deux bouteilles de vin. Un léger calcul le mène à la conclusion que j’ai l’intention de le saouler un peu, ce qui ne fait pas parti de ses habitudes en pleine semaine. Ni lors du week-end. Tchin-tchin, on trinque. Waitress nerveuse se retient de ne pas vider son verre d’un trait.


*


À table, devant le tartare de bœuf. J’attends une pause de conversation pour la première question. C’est parti. Nous discutons du fait que Joli Minois a invité son ex au souper de fête de sa mère, trois semaines plus tôt. JM en colère contre Waitress. Il la croit possessive et jalouse.



- Euh, non. C’est pas le fait que tu ais été avec elle qui me dérange. Plutôt le pourquoi tu as tenté de me le cacher.



*


Au plat de résistance, Waitress poursuit l’attaque. J’avance nos projets plutôt divergeant pour le futur, notre manière de vivre qui ne se ressemble pas.


- Waitress, j’ai l’impression que tu fais tout pour me décourager d’être avec toi.



Dans les dents. Quoi répondre ? Il a raison. Je commence à devenir amoureuse. Puisque je me doute que ce sentiment n’est pas partagé, je tente de faire en sorte qu’il me fuie. Je n’arrive pas à me convaincre de ne plus le téléphoner, à refuser ses invitations, à l’expulser de mon existence. Il faut que l’initiative vienne de son côté, au plus vite. J’aurai mal et ça passera. L’ennuie, c’est que je ne peux pas lui dire. Il me prendra pour une folle. À moins que ce ne soit déjà le cas ?


Waitress change de sujet.


*

Le brick aux pommes et au romarin sur la table. J’arrive à la finale.


- Si tu ne sais pas ce que tu veux avec moi, si tu hésites à ce point, JM, tu ne crois pas que c’est justement parce que ça ne t’intéresse pas, que tu devines que ça ne fonctionnerait pas nous deux ?


Renversement de situation. Ce devrait être le coup de grâce, le moment ou il avoue que j’ai misé juste, que nous devrions cesser de nous fréquenter. Il me retourne plutôt la question. Pense que je fais de la projection, que c’est plutôt moi qui hésite, envoie des messages contradictoires.



Et la Waitress d’avouer qu’elle devient amoureuse…


***

Une semaine plus tard, j’ai encore des nouvelles de Joli Minois. Nous nous voyons toujours. Et il n’a pas encore parlé. J’ignore ce qu’il pense, ce qu’il veut, ne veut pas. Et je me balade partout, ma tête coupée sous le bras.

samedi 6 octobre 2007

Mise à mort, Part I

Mardi, jour de congé #2. La Waitress ignore de quoi seront composées les prochaines heures. Une invitation au cinq-à-sept, l’obligation de faire des courses, peut-être une envie de ballade en voiture. Le soleil brille, l’air est chaud, la lumière jaunâtre de l’automne accentue les couleurs des arbres entourant la galerie de mon appartement. L’incendie s’insinue jusqu’à ma tête. La main qui se resserre plus fort sur la tasse de café, une pensée mauvaise pour le garçon que je fréquente. Nous nous voyons de façon régulière depuis plusieurs semaines, mais rien n’avance. Je veux provoquer quelque chose. Trop de question, trop de non-dit. Je déteste.


15h03. Waitress saisi le téléphone et compose le 1-800-JOLI-MINOIS. Il accepte mon invitation à souper, arrivée prévue pour 19h00. Il ne se doute de rien.


Je rejoins Collègue Française, question qu’elle m’aide à élaborer un menu.


- Pourquoi tu ne lui prépares pas juste quelque chose de simple, que tu peux faire toute seule ?
- Parce que je lui rentre dedans ce soir. Une question piège par plat, qui alimentera la conversation jusqu’au couvert suivant. Au dessert, il arrivera à la conclusion que ça ne peut pas fonctionner nous deux et il partira pour toujours.
- Un souper d’adieu ?
- Un souper mise à mort. À moins qu’il ne fasse une déclaration d’amour, mais ça n’arrivera pas.
- C’est cruel. J’adore le concept. Donne moi quinze minutes, j’arrive.


Je range l’appartement, commence à réfléchir à la discussion que je tiendrai avec Joli Minois. Faudra être délicate, il ne doit pas quitter avant la fin du souper. La nervosité me gagne, j’ouvre une bière. Une moto se stationne devant l’appartement, mon amie apparaît après 45 minutes. Le droit à la demi-heure française m’oblige au silence. Elle entre, lance sa veste de cuir sur le dossier du fauteuil, se rend au frigo et se saisi d’une bière. Nous nous observons un instant, elle avec un grand sourire, moi avec de légers tremblements.


- Et si tout va de travers ?
- Dans ce cas, Waitress, je viendrai prendre le dessert avec toi.


Breafing. Au bout de quelques minutes, le menu est fixé.



Tartare de bœuf
*
Filet de porc farci au chèvre et aux pommes, mini-ratatouille, mousseline de pomme de terre Yukon Gold
*
Brick aux pommes et au romarin


Nous allons faire les courses. Je courre dans les allées de l’épicerie pour gagner du temps, Française crampée et essoufflée derrière moi. Arrêt à la SAQ. Deux bouteilles de rouge. Et une envie de bulles. Pourquoi pas ? J'ai le droit de célébrer le fait qu'on me larguera ce soir. Je choisie donc un vin mousseux pour l’apéro.


Retour à l’appartement. 17h24. Je débouche deux autres bières. La Française entame les préparatifs du repas, tandis que je passe le balais, avant d’aller me changer.


Après une longue séance d’essayage, je me retrouve en jolie jupe rouge, avec une petite camisole noire.

- De quoi j’ai l’air ?
- C’est parfait, Waitress. Mais j’trouve que t’as l’air plus dépeignée que coiffée.
- C’est bien, j’ai toujours l’air de revenir de faire l’amour.


On cogne à la porte. Il a de l'avance.


Merde, merde, merde.

jeudi 4 octobre 2007

Retour

Suite à une période de spleen prolongée, la Waitress s'est retirée un temps de la vie en société. Puisque je remonte la pente de façon quasi spectaculaire depuis les derniers jours, j'annonce un retour pour la fin du week-end.

Histoire de garçon, de sexe, de travail. Préparez le pop-corn.