mercredi 14 novembre 2007

Semaine catastrophe

Dimanche matin, Waitress au resto. Je pousse la porte, brûlante de fièvre, maux de ventre et hauts le coeur en prime. J'accroche mon manteau et mon sac au vestiaire du sous-sol, remonte l'escalier. Vertige. Derrière le bar, je me prends un verre d'eau et deux Advils. Extra fort. Collègue regarde le pot de pilules et, l'air découragé, me demande si je suis sortie la veille. Pas vraiment. Malade comme un chien. Et je suis quand même présente au travail. Je m'attends à de beaux bravos, des clients hystériques devant mon courage et ma ténacité, une grande banderole avec "Go, Waitress, go" qui bat au vent de la climatisation. Pas à un collègue soupçonneux.

Quinze minutes avant le début officiel de ma journée, je suis dans le jus. Trois nouvelles tables dans ma section, sans compter le rush de 10h00 qui arrive. Suivit de celui de midi. Waitress pas forte vérifie la posologie des Advils. Deux aux quatre heures. Zut. Faut encore attendre un peu. Je me lance.

Sourires pâles, mains qui tremblent et sueurs infernales. Cernes profonds, visage blanc. Mes clients n'ont pas pitié de moi. Au contraire, ils se montrent encore plus exigeant qu'à l'ordinaire. Sans oublier le fameux cuisinier du week-end qui ne m'aime pas beaucoup. Ses assiettes sont à chier, je les retourne. N'aide pas à ma popularité.

Après 137 clients, j'ai droit à une pause d'une heure avant de reprendre pour la soirée. Repos mérité. Waitress regagne sa Basse-Ville, son sofa, et sa couverture de laine.

*
Retour au boulot. État: Beurk. Réservation : Aucune. Bonne nouvelle. Je pourrai fermer le resto assez tôt et retourner dormir. Dormir...
Arrive le premier couple de la soirée. Vingt minutes avant l'ouverture. Il y a pourtant une pancarte dans la porte avec un gros "De retour à 17h00". Ils sont vieux, peut-être aussi aveugles et analphabètes.
- C'est ouvert, Mademoiselle ?
- Oui, dans vingt minutes.
- Parfait, on va s'asseoir à la table près de la fenêtre.
- !!!!!!
Mise en place à peine entamée, je n'ai pas encore les informations du menu de la table d'hôte en vigueur. Le couple s'installe et me regarde me démener pour compléter un quart d'heure de travail en deux minutes. Mme Colorée, une habituée, fait son entrée. Moins dix. Bordel.
- Un café.
- J'vous fait couler un silex, vous donne ça dans un instant.
Regard mauvais. Elle me trouve incompétente; elle est là et le café n'est pas prêt. Câlis.
Un couple de nains passe la porte. Vestes de cuire, pantalons trop courts, la femme arbore une très chouette permanente. Et un bec de lièvre. Assez prononcé pour l'empêcher de bien articuler ses mots. Je lui fais répéter tout ce qu'elle me dit. Waitress mal à l'aise qui se concentre fixer les yeux. Non. Pas la bouche, les yeux. Remonte, remonte, Waitress. C'est ça. Les yeux.
Tandis que je leur explique le menu, une famille de quatre personnes arrivent. Décide d'aller s'asseoir eux-même. Leur fais signe de la tête que je les ai vu. Un homme et un garçon font de même. Suivit d'une femme seule. Merde, merde, merde. Bec-de-lièvre me demande pour la troisième fois le choix des entrées. Comme je lui réponds, une main sur mon épaule. C'est la mère de famille.
- Mademoiselle, est-ce que c'est vous qui allez nous servir ?
- Oui, je suis à vous dans deux secondes.
- C'est qu'on a faim, nous.
- !!!!!!!!
*
À 20h00, le cuisinier décide de partir. Terminé, plus de nouvelle table. Parfait. Il ne reste plus qu'un groupe d'étudiant qui prennent les dernières bouchées de leurs desserts et un jeune homme, seul, avec son portable et une tasse de thé. Nos regards se croisent souvent, petits sourires. Tandis que j'effectue le paiement de son repas avec sa carte de crédit, il se lève et me rejoint. Il me raconte qu'il vient d'emménager dans le coin, qu'il vient de Sorel. Je lui pose des questions sur son travail, ce qui l'a emmené à venir s'établir ici. Sourire charmant, joli visage. Gentil. Il me demande mon horaire, dit qu'il reviendra. Dommage que la Waitress soit malade. Elle aurait saisit l'occasion pour cruser un peu.
*
Seule dans le bistro, j'effectue la fermeture. Je monte les chaises sur les tables, vide le lave-vaisselle. Patron arrive, en criant. Ça fait trois heures qu'il tente de me rejoindre au téléphone. Mais la ligne n'a pas été raccrochée. Il m'engueule, déverse sa colère sur moi, me postillonne au visage. Les yeux pleins d'eau, je m'excuse. Rien d'autre à ajouter. Il vérifie les messages sur la boîte vocale, puis fait son enquête. Pour s'apercevoir que c'est le cuisinier qui a oublié de fermer le téléphone. Me demande pardon. Je ne réponds rien.
En prenant ma voiture, je réfléchie. Je suis malade. Me présente quand même à mon poste puisque personne n'est disponible pour me remplacer. Une journée à chier. Patron qui vide sa colère sur moi, comme tout le temps. J'aime pas ça. Mais pas du tout.
Le pire ? C'est que lundi, j'étais présente lorsque Patron a parlé de l'histoire du téléphone au cuisinier. Il en a fait une blague. Pas fâché du tout. Lui a même dit que ce n'était pas grave. Pourquoi moi je me suis fais engueuler, alors ?
Waitress a comme une envie de vacances.
N.B. La Waitress est désolée de venir pondre un texte de chialage. Mais faut que ça sorte, des fois !

7 commentaires:

Lobsterman a dit…

Ça m'en prendrait moins que ça pour péter une coche nucléaire, fais que t'as bien le droit de te défouler un peu..

S@hée a dit…

Sache, ma belle, qu'on ne chiâle jamais: on déverse le trop plein.

Je t'embrasse xxx

Julie a dit…

Tu es faite forte d'avoir encaisser le tout. Chiale ma belle, j'en ferais tout autant pour moi que ça.

Cyndie a dit…

Mais non, vas-y! On est là pour ça, sinon à quoi ça servirait un blog si on ne peut y raconter que le beau? J'espère que ça t'a un tout p'tit peu soulagée au moins...

Anonyme a dit…

Quand t'es trop affamé et/ou trop pressé pour t'asseoir à une table, prendre un menu, commander et attendre ton plat, tu vas au service à l'auto de St-Hubert Express, me semble?!

Des journées comme celles-là, il faut bien se défouler un peu..!

Monsieur l'adulte a dit…

Sté qu'on engage chez nous, 9 à 5, lundi au vendredi, avec 9 jours de maladie par année... ;)

Unknown a dit…

J'admire que tu sois encore au poste...car ça me purge au plus haut point que ton patron puisse te manquer de respect, quand tu fais tout en ton pouvoir pour avancer.
Je t'envoie plein de bonne énergie, et te souhaite une début de semaine plus ensoleillé